Copy to Clipboard. Add italics as necessaryCitation: Anne-Violaine Houcke, «Pasolini en Afrique, 1958–69. Quelques figures et intertextes français d’une poétique africaine (Rimbaud, Sékou Touré, Césaire, Senghor, Sartre)», dans Pasolini. Dialogues avec la France / Dialoghi con la Francia, éd. Marco Antonio Bazzocchi, et al., Cultural Inquiry, 36 (Berlin: ICI Berlin Press, 2025), p. 135–63 <https://doi.org/10.37050/ci-36_08>

Pasolini en Afrique, 1958–69Quelques figures et intertextes français d’une poétique africaine (Rimbaud, Sékou Touré, Césaire, Senghor, Sartre)Anne-Violaine Houcke

Abstract

Entre l’épigramme « À la France » (1958), dans laquelle Pasolini se réfléchit à la fois dans le « nègre » Sékou Touré, président de la Guinée, et dans le « blond Rimbaud », et le Carnet de notes pour une Orestie africaine (1969), l’Afrique occupe une place centrale dans l’œuvre de Pasolini. Ce texte étudie quelques intertextes français qui nourrissent sa pensée, et identifie la manière dont la « survivance », d’abord pensée comme moteur de l’alternative féconde entre rationnel et irrationnel, prend peu à peu la forme d’une pensée de l’altérité.

Mots-Clés: Pasolini; Afrique; négritude; Rimbaud; Senghor; Sartre; Césaire

Ahmed Sékou Touré est né en 1922, comme Pier Paolo Pasolini. Le poète, peut-être sensible à sa contemporanéité avec le premier président de la république de Guinée, écrit, dans un poème intitulé « À la France » daté de l’été–automne 1958 :

J’ai la joyeuse surprise de voir que je ressemble
à Sékou Touré, le président de la Guinée ;
le nez écrasé et les yeux vifs ;
lui aussi remonté à la grisaille de l’histoire
des gouffres de pur esprit sauvage :
nègre vraiment comme était blond Rimbaud.1

Or, la contemporanéité, Pasolini le sait bien, n’est pas tant une question de dates synchrones que d’affinités historiques, psychiques, poétiques, politiques. Avec elle, le temps sort de ses gonds, et d’ailleurs, dans le poème, le miroir dans lequel Pasolini se contemple dédouble son image : Pasolini se réfléchit dans le « nègre » Sékou Touré, lequel Beginning of page[p. 136] à son tour fait affleurer l’image du « blond » Rimbaud du siècle précédent. L’un, Pasolini, se dédouble, puis devient trois. Je voudrais déplier cette trinité pour voir ce qui se joue entre 1958 et 1969–70, période pendant laquelle le continent africain bouleverse la géopolitique mondiale (1960, « année de l’Afrique », voit l’accession à l’indépendance de 17 pays) et occupe une place centrale dans l’œuvre de Pasolini (1958, poème « À la France » ; 1969–70, Carnets de notes pour une Orestie africaine). Le premier temps de mon texte envisagera l’autoportrait bifrons de Pasolini en Rimbaud et Sékou Touré, et la manière dont l’Afrique s’articule, à la fin des années cinquante et au début des années soixante, sur une vision de l’Histoire polarisée par la dialectique irrationnel (Préhistoire)-rationnel (Histoire). J’envisagerai ensuite de possibles liens entre quelques textes de la « Négritude » — Léopold Sédar Senghor, Aimé Césaire — et Pasolini dès 1958, et quelques convergences et divergences entre « Orphée noir », préface de Jean-Paul Sartre à la célèbre anthologie de Senghor, et le texte « La Resistenza negra », préface de Pasolini à une autre anthologie de « littérature noire ». Ces intertextes nous servirons enfin à interroger la temporalité anachronique de l’Orestie africaine réalisée en 1969–70, mais que Pasolini propose de « rétro-dater » en 1959.

Autoportrait en nègre et blond — Pasolini, Sékou Touré, Rimbaud

Sékou Touré et les intellectuels français, figures de la contradiction

L’autoportrait bifrons de 1958 — la double identification au poète Rimbaud et à l’homme politique et militant marxiste Sékou Touré — manifeste la spécificité de l’intérêt de Pasolini pour les mouvements de décolonisation : cet intérêt est relativement précoce dans le contexte italien, il est médié par le rapport de Pasolini à la France, et il articule étroitement la réflexion poétique à la question de l’engagement politique. Pasolini compose son poème avant la tenue à Rome en 1959 du deuxième Congrès des écrivains et artistes noirs (la première édition s’était tenue à Paris en 1956), et avant la traduction italienne en 1962 des Damnés de la Terre de Frantz Fanon.2 Or, « À Beginning of page[p. 137] la France » témoigne de l’attention portée par Pasolini à la politique menée par la France du général de Gaulle vis-à-vis de ses colonies. Le poème fait partie de la série d’épigrammes intitulés « Humilié et offensé » (« Umiliato e offeso »), publiés pour la première fois dans Officina en mars–avril 1959. Pasolini les avait envoyés à Franco Fortini qui, dans une lettre de décembre 1958, lui avait dit : « Magnifique, celui pour la France » (Bellissimo quello per la Francia).3 Pasolini l’écrit donc à l’automne 1958, qui voit la Guinée accéder à l’indépendance. Elle est alors le seul des territoires français d’outre-mer à refuser d’entrer dans la Communauté française proposée dans le référendum constitutionnel du 28 septembre 1958, et il n’est pas impossible que Pasolini ait connu l’audace de la phrase prononcée par Sékou Touré, alors président du conseil de gouvernement et député de Conakry, dans son discours du 25 août 1958, en présence du général de Gaulle : « Il n’y a pas de dignité sans liberté. […] Nous préférons la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage. »4 Ce à quoi de Gaulle avait répondu : « L’indépendance est à la disposition de la Guinée. […] La Métropole n’y fera pas obstacle. Elle en tirera, bien sûr, des conséquences. »

L’auteur de l’épigramme, Pasolini–Sékou Touré, est une contamination de l’homme politique guinéen et du poète italien, mettant en garde un pays qui, loin d’être à la hauteur de ce moment historique, s’engage dans une guerre de déstabilisation de son ancienne colonie. Surtout, Pasolini intègre le geste de Sékou Touré à sa propre poétique, il en déplace le sens et la portée immédiate — l’affirmation d’indépendance de la Guinée — pour l’incorporer dans une vision hégélienne de l’Histoire associant le sous-prolétariat à l’idée de Préhistoire et de Beginning of page[p. 138] nature, dont l’Afrique serait exemplaire.5 Le poème se poursuit en effet ainsi :

Peut-être revient-il à qui est né dans la forêt, de pure mère,
pour être seul, pour nourrir seul une joie,
de se rendre compte de la vie réelle :
renoncer à obéir au sexe pour penser,
cesser d’être enfant pour devenir citoyen,
trahir les Dieux pour lutter en compagnie de Marx !6

Sékou Touré a donc renoncé au pur esprit sauvage, au sexe, à l’enfance, aux Dieux, pour « remonter à la grisaille de l’histoire » et « lutter en compagnie de Marx ». L’interprétation que Pasolini donne, en 1959–60, de l’Orestie d’Eschyle, qu’il traduit au même moment pour une mise en scène de la Compagnia del Teatro Popolare Italiano à Syracuse, montre bien qu’il ne s’agira aucunement de faire table rase du monde archaïque : ce monde primordial, « opérant sous le signe utérin de la mère », irrationnel, incarné par les Érinyes, sera réassimilé dans le monde moderne — ce sera le sens de la transformation des Érinyes en Euménides.7

Il s’agit là d’une question intime, et il faut entendre le poids des deux mots ouvrant le troisième vers du poème « À la France » : « lui aussi remonté à la grisaille de l’histoire | des gouffres de pur esprit sauvage ». « Lui aussi », c’est-à-dire : « comme moi, Pasolini ». Un autre poème de La Religion de mon temps, daté d’avril 1960, explicite cette projection intime du poète sur le corps de l’Afrique. C’est le célèbre « Fragment à la mort », qui se termine ainsi :

J’ai été rationnel et j’ai été
irrationnel : jusqu’au bout.
Et maintenant… ah, le désert assourdi
par le vent, le superbe et immonde
soleil d’Afrique qui illumine le monde.

Beginning of page

[p. 139]
Afrique ! Ma seule
alternative……………………………
………………………………………8

Le regard que Pasolini porte sur la question de la décolonisation est en effet informé par ses propres préoccupations. Sa réaction au « Manifeste des 121 » publié en septembre 1960 par des intellectuels et artistes français pour défendre « le droit à l’insoumission dans la guerre d’Algérie », est significative. Son texte, « Témoignage pour les 121 », est bien moins une prise de position sur la guerre d’Algérie et la décolonisation que l’expression de son admiration pour les signataires et une analyse de leur geste.9 Il commence par dire qu’il ne comprend pas bien la situation française, mais qu’il est « de tout cœur pour les Algériens », avant d’en arriver au cœur de son texte :

Dans ce magma, projeté vers un aveugle futur, émerge un phénomène parfaitement limpide et indubitable. Le courage des intellectuels français signataires du manifeste. C’est l’un des épisodes les plus beaux et les plus excitants de ces dernières années. Précisément parce qu’il implique doutes et contradictions : il n’est pas un beau geste, dangereux mais simple, courageux mais évident. Il est, au contraire, extrêmement compliqué. Le courage, dans ce cas, n’est pas seulement héroïque : il est aussi intellectuel.10

Pasolini retient donc avant tout la complexité du geste de soutien, les intellectuels signataires se dressant un peu contre eux-mêmes, contre les Français et les Français d’Algérie — « le problème n’est pas simple, écrit-il, si l’on prend en compte le fait, bien connu, qu’il y a en Algérie un million de Français. » L’insoumission est ainsi interne, intime, de soi à soi : elle est le geste par lequel les intellectuels français, fleuron du rationalisme occidental, en reconnaissant la révolte algérienne, acceptent la contradiction interne et accueillent l’irrationnel.

Anticipons légèrement : quelques années plus tard, l’épisode du « Grand Cirque de France », qui devait initialement figurer au début Beginning of page[p. 140] des Oiseaux, petits et gros (Uccellacci e uccellini, 1966), mais sera coupé au montage, traduira la déception de Pasolini vis-à-vis de la France. Le cinéaste y épingle en effet Michel Cournot, qui avait fustigé L’Évangile selon saint Matthieu comme étant un film de prêtre caractéristique d’un « art pédé ».11 Dans « Le Grand Cirque de France », « Courneau » est un dompteur parisien parvenu à civiliser un crocodile du Congo, un chimpanzé du Rwanda, un Python d’Amazonie, etc., mais il est mis en échec par un Aigle, allégorie d’un Tiers-monde résistant à la domestication.12 Aux lecteurs de l’hebdomadaire Vie nuove, avec lesquels il échange depuis 1960, Pasolini écrit que le dompteur « représente le rationalisme exacerbé, désespéré, mis hors-jeu par un nouveau type de rapports avec le monde de l’irrationalisme, avec le Tiers-Monde ».13 La France s’est finalement montrée incapable d’intégrer l’irruption d’irrationalité portée par le Tiers-monde. Ce rationalisme intégriste concernerait tout particulièrement l’intellectuel laïc devenu marxiste, qui « craint le catholicisme […] comme une rechute dans la condition conformiste et bourgeoise dont il est sorti grâce au marxisme »,14 cet intellectuel qui refoule le « moment irrationnel, religieux » qui se trouve en l’homme et dans le monde et reste prégnant dans le Tiers-monde.

On voit à quel point la question de la crise du marxisme s’est infiltrée dans la pensée de Pasolini entre 1958 et le milieu des années soixante, en lien avec son rapport au Tiers-monde.15 À la fin des années cinquante, Sékou Touré entre dans la grisaille de l’histoire en compagnie de Marx, et Pasolini peut s’appuyer sur sa lecture de l’Orestie Beginning of page[p. 141] pour imaginer que quelque chose restera de sa société « primitive ». Le « Manifeste des 121 », en retour, laisse entrevoir la possibilité, pour les sociétés occidentales, pour la France, de se contredire, c’est-à-dire d’accepter en leur sein l’irruption de l’irrationnel. Cinq ans plus tard, Des oiseaux, petits et gros montre que cet espoir est déçu.

De Rimbaud à Davidson : poésie et résistance

Sous les traits de Pasolini–Sékou Touré affleure, comme en un palimpseste, un autre visage, celui de Rimbaud, figure majeure de l’adolescence de Pasolini, qui ne cessera ensuite de revenir dans son œuvre. « À la France » esquisse ainsi une trinité de la résistance et des marges avec, face à Pasolini, l’homme d’État africain, panafricain, l’acteur de l’indépendance guinéenne, qui était né français, dans un pays de l’Afrique-Occidentale française, et le poète rebelle de Charleville, sur la frontière belge, le voyageur qui écrivait n’avoir « du goût que pour la terre et les pierres ».16 Rimbaud est d’abord entré dans la vie de Pasolini comme figure de résistance, sans doute même comme moteur de la Résistance. Il disait en effet avoir cessé d’être « naturellement » fasciste le jour où il avait entendu des poésies de Rimbaud, autour de 1937–38.17 La poésie de Rimbaud et la poésie hermétique avaient représenté pour lui une réaction à la grandiloquence du fascisme et une résistance linguistique aux prétentions soi-disant égalitaires et en réalité uniformisatrices du régime. Comme Rimbaud, Pasolini a alors voulu « trouver une langue » et, en ce sens, l’écriture dialectale pasolinienne fut rimbaldienne et donc, rétrospectivement, « nègre ».Beginning of page[p. 142]

Entre la fin des années cinquante et le début des années soixante, Rimbaud est remobilisé dans un contexte nouveau, il devient un poète africain. Il n’est sans doute pas anodin que Pasolini rappelle, dans son poème Qui je suis ? composé en 1966, qu’il avait envoyé ses poésies frioulanes, réunies en 1942 dans le recueil Poèmes à Casarsa, à son père, militaire fasciste alors prisonnier au Kenya : l’importance de l’Afrique est ici discrètement anticipée, rétroactivement tissée au fil « Rimbaud-poésie-dialecte-Résistance » de l’autobiographie pasolinienne.

Le poète français figure aussi en filigrane dans les derniers vers du poème déjà cité « Fragment à la mort », dont Pasolini précise, dans une lettre adressée à l’été 1961 à son ami Francesco Leonetti : « C’est une interjection décadente, de défaite, où l’Afrique n’est pas l’Afrique de Lumumba, mais celle de Rimbaud. »18 Quelques mois plus tard, il évoque à nouveau ce vers dans Vie nuove :

La Religion de mon temps exprime la crise des années soixante… La sirène néocapitaliste d’un côté, le désistement révolutionnaire de l’autre : et le vide, le terrible vide existentiel qui s’ensuit. Quand l’action politique devient moins intense, ou se fait incertaine, on ressent alors soit un désir d’évasion, de rêve (« Afrique, mon unique alternative ») soit une insurrection moraliste (mon irritation contre une certaine hypocrisie de gauche […]).19

Rimbaud sera également présent dans le « Grand Cirque de France », où c’est l’Aigle qui finit par déteindre sur son dompteur, qui se met alors à lire des textes « religieux » — Pascal, l’encyclique de Jean xxiii Pacem in terris, mais aussi Rimbaud. Rimbaud est donc du côté de l’irrationnel, du religieux et de l’évasion, voire de la fuite. C’est aussi ce que Pasolini exprime lorsque, en 1961, il revient sur le geste de protestation de Rimbaud : « Il dit : je ne peux plus parler ; c’est-à-dire qu’il renonce à la langue, qui est l’institution capitaliste-bourgeoise, et il part en Afrique, il s’évade. »20 C’est ce que fait Pasolini lui-même au début des années soixante, qui effectue son premier voyage en Afrique Beginning of page[p. 143](au Kenya) en février 1961, avant de commencer, en avril de la même année, le tournage de son premier film, Accattone. Cette entrée en cinéma, il l’a lui-même présentée comme une volonté de fuir la nation italienne et sa langue, pour s’accorder avec sa « passion de la vie, de la réalité, de la réalité physique, sexuelle, objectale, existentielle autour de [lui] ».21

Sékou Touré est « nègre » comme était « blond » Rimbaud : ce sont là deux couleurs de « l’esprit sauvage », en tout cas deux attributs d’une différence radicale, d’un refus d’être assimilé par la société néocapitaliste. Dans la pièce de théâtre Affabulation, dont Pasolini commence la rédaction en 1966, la blondeur du Fils, scandaleuse, paysanne, fera tache dans l’univers bourgeois du Père et constituera la marque physique de sa différence. Mais l’homme politique guinéen a entamé une sortie du « pur esprit sauvage » — de la « passion » — pour aller vers la « grisaille de l’histoire »,22 la vie civique et la raison — l’« idéologie », tandis que, à l’inverse, Pasolini présente sa propre alternative africaine comme une régression rimbaldienne. L’apparente contradiction est à la mesure du bouleversement dans la vie et l’œuvre de Pasolini, dont le tropisme africain et le passage au cinéma sont les deux facettes principales.

L’interprétation pasolinienne de l’Orestie d’Eschyle est claire : il ne s’agit pas de franchir inéluctablement la frontière, que ce soit dans un sens — du monde archaïque vers le monde moderne — ou dans l’autre. L’Afrique et le cinéma permettent ainsi l’immersion dans un territoire non assimilé, où Pasolini peut vivre et élaborer poétiquement la sineciosi, cette figure de style consistant à affirmer deux propositions contraires sur un même objet, et que Franco Fortini relève — justement en 1959 — comme la composante fondamentale de son style. Pasolini l’interprètera plus tard comme la forme stylistique de sa propre structure interne « brisée [spaccata], c’est-à-dire ouverte », contradictoire, celle de bourgeois voulant être marxiste, ouvert sur Beginning of page[p. 144] un monde différent, le monde qui survit, le Tiers-monde, la « pensée sauvage » étudiée par Lévi-Strauss : ce serait même son « totémisme stylistique », puisque le totémisme « dans l’interprétation de Lévi-Strauss est une tentative de processus dialectique, d’intégration des contraires ».23

C’est dans Le Père sauvage, dont les premières mentions remontent au début de l’année 1962, que Pasolini crée la figure humaine de ce totémisme stylistique : Davidson. Le film, dont la réalisation sera empêchée par le procès de La Ricotta, est inspiré d’un article d’Yves Benot (pseudonyme de l’intellectuel français Edouard Helman), paru dans Il Contemporaneo en octobre 1961, relatant ses trois années d’enseignement à Conakry.24 Pasolini élabore à partir de ce texte et de l’actualité récente — les événements meurtriers liés à la sécession de la riche région minière du Katanga, à peine deux semaines après l’indépendance du Congo — l’histoire, dans un État africain récemment décolonisé et en proie à la guerre civile, d’un professeur de lettres européen qui tente d’ouvrir à ses élèves la voie d’une modernité démocratique, libérée à la fois d’un état de sauvagerie préhistorique et de l’aliénation coloniale récente. Un élève retient particulièrement son attention, Davidson, qui, à la fin, écrit un poème ainsi décrit dans le Traitement du film :

Ce ne sera pas un poème de joie, de « pure vie ». De douleur, bien plutôt, de déception, de critique, oui, de critique. L’âpre sentiment d’une passion rationnelle — si timide soit-elle — sur le doux sentiment des choses de la vie, en Afrique.25

Pasolini avait-il vu le film d’actualités produit par la Settimana Incom le 24 novembre 1961, qui portait sur le massacre des treize aviateurs italiens engagés dans la mission de paix des Nations Unies Beginning of page[p. 145] à Kindu ?26 Son titre, en tout cas, Furia nera (Furie noire), n’aurait pu que retenir son attention, tant il résonnait avec sa lecture récente de l’Orestie. Dans Le Père sauvage, après le massacre des soldats onusiens, la tribu de Davidson, en proie à une « sanguinaire exaltation » se livre dans la forêt à un rite ancestral, préhistorique. Pasolini ne contamine pas encore explicitement le scénario africain et la trilogie d’Eschyle — il le fera en 1969 dans son film Carnet de notes pour une Orestie africaine — mais il est clair que ce massacre et ce rite se font sous le signe des Érinyes (nom grec des Furies), déesses primitives des « sentiments primordiaux, instinctifs et obscurs ».27

Davidson y a pris part, il s’est « enfoncé à rebours dans le temps »,28 lui qui, aidé de son professeur, comme Sékou Touré accompagné par Marx, avait pourtant pris le chemin de la grisaille de l’histoire. Mais de cette ultime régression, il ressort conscient de lui-même, animé d’une « passion rationnelle », poète véritablement. La Furie s’est transformée en Euménide : l’irrationnel (la passion) n’est « pas refoulé, mais, endigué et dominé par la raison, [il] devient alors une énergie active et une passion productive et fertile ».29 Dans le poème « La Guinée », contemporain du Père sauvage, Pasolini écrit : « La Négritude, dis-je, qui sera raison. »30 La Négritude devenue raison, c’est sûrement cette « passion rationnelle » de Davidson, par laquelle le jeune poète africain incarne autre chose que la fuite désillusionnée dans l’irrationnel. Quelques vers plus haut, Pasolini écrivait en effet : « On ne s’échappe pas, je le sais. » Beginning of page[p. 146]

Orfeo negro, Resistenza negra — Pasolini avec Senghor, Césaire, Sartre

Poètes de la négritude, ou la révolution par la poésie

Le mot « négritude » ne figure pas dans le Père sauvage, mais Senghor est présent, lorsque l’enseignant, pour les aider à sortir de l’endoctrinement colonial, leur lit « une œuvre d’un poète noir contemporain (Senghor, par exemple, ou De Andrade) ».31 Le nom de Davidson, la mention de Senghor et de De Andrade relient Le Père sauvage à l’anthologie dirigée justement par Mário de Andrade, Letteratura negra : la poesia, parue en 1961 avec une préface de Pasolini intitulé « La Resistenza negra ». Senghor y figure, ainsi qu’un poète sierra-léonais, Davidson Nicol, qui pourrait bien avoir donné son nom au poète du Père sauvage.32 En effet, l’idée centrale de la préface, celle du « concept “Afrique” » est élaborée par Pasolini à partir de deux vers de ce poète — « Tu n’es pas un pays, | Afrique, tu es un concept » — à qui Pasolini reproche de n’en rien faire. Pasolini, lui, construit le « concept d’une condition sous-prolétarienne extrêmement complexe encore inutilisée comme force révolutionnaire réelle », où l’Afrique est en quelque sorte reterritorialisée « avec tout le monde de Bandung, de l’Afroasie qui, disons-le clairement, commence à la périphérie de Rome, comprend notre Sud, part d’Espagne, de Grèce, des États méditerranéens, du Moyen-Orient ».33 Accattone, tourné dans les borgate de Rome, dont Pasolini avait d’ailleurs déjà écrit qu’elles étaient brûlées par les « soleils africains »,34est donc le premier film africain de Pasolini, et l’on Beginning of page[p. 147] pourrait même imaginer que le masque de boue noir qu’Accattone se crée, en plongeant son visage dans le limon du Tibre, explicite cette analogie (voir figure 1).

FIG. 1. Le masque de boue d’Accattone (Franco Citti) – Accattone (Pier Paolo Pasolini, 1961).
Fig. 1. Le masque de boue d’Accattone (Franco Citti) – Accattone (Pier Paolo Pasolini, 1961).

Le concept de négritude, élaboré par Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor, n’est pas non plus mentionné dans la préface à l’anthologie de De Andrade, mais on a vu qu’il figure dans le poème « La Guinée », dont l’écriture est à peu près contemporaine de celle de « La Resistenza negra ». Le terme apparaît en Italie dès 1950, dans la foulée de l’Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française Beginning of page[p. 148] qui, dirigée par Léopold Sédar Senghor en 1948 et préfacée par un texte de Sartre intitulé « Orphée noir », « fit connaître à l’Europe entière les poètes francophones du Tiers-monde ».35 Vittorio Sereni, ami de Pasolini, traduit six poésies du recueil dès 1951 et les anthologies de Carlo Bo en 1954 et de Alfredo Riedel en 1957 en sont partiellement issues, signe d’une diffusion de l’ouvrage de Senghor dans les milieux intellectuels italiens.36

Il est difficile de savoir quand Pasolini en eut connaissance, mais on peut faire l’hypothèse que l’allusion à Dostoïevski contenue dans le titre de la section poétique où se trouve, en 1958, le poème « À la France » : « Umilato e offeso », a été réactualisée par une lecture de Césaire qui fait passer au singulier le pluriel du titre du premier grand roman de Dostoïevski. En effet, l’anthologie de Senghor contient un extrait du texte de Césaire Et les chiens se taisaient, paru en 1946 dans Les Armes miraculeuses (et dont la version théâtrale est publiée en 1956 dans Présence africaine), dans lequel le Rebelle dit à sa mère : « Mon nom : offensé ; mon prénom : humilié ; mon état : révolté ; mon âge : l’âge de la pierre. »37 Le vers est par ailleurs cité par Sartre dans sa préface, dans laquelle il accorde une place centrale au poète martiniquais, lorsqu’il écrit : « Étrange chemin : humiliés, offensés, les noirs fouillent au plus profond d’eux-mêmes pour retrouver leur plus secret orgueil. »38 L’anthologie de Senghor contient par ailleurs le poème de Césaire « À l’Afrique », qui dut avoir un certain écho car il est traduit par Carlo Bo en 1954 dans son Antologia di poeti negri, puis à nouveau par Franco Fortini en 1959.39 Rien n’interdit d’imaginer que Pasolini y pense lorsqu’il intitule son poème « À la France », renversant l’ode à l’Afrique en épigramme contre la France du général de Gaulle.40Beginning of page[p. 149]

Pasolini a sans doute eu connaissance assez tôt de l’anthologie de Senghor. Quoi qu’il en soit, il est improbable qu’il soit passé à côté de la traduction de la préface de Sartre, « Orphée noir », dans Che cos’è la letteratura ? en 1960, tant, comme le relève Gian Luca Picconi, son texte « La Resistenza negra » présente des affinités évidentes avec celui de Sartre.41 Par ailleurs, Mario de Andrade était secrétaire de la revue Présence africaine, à laquelle Sartre était lié depuis sa fondation.42 Plus que le terme même de négritude, dont Sartre souligne d’ailleurs qu’il est « assez laid »,43 c’est la réflexion menée sur le lien entre la révolution et la poésie qui a dû frapper Pasolini. Sartre veut en effet montrer « pourquoi c’est nécessairement à travers une expérience poétique que le noir, dans sa situation présente, doit d’abord prendre conscience de lui-même et, inversement, pourquoi la poésie noire de langue française est, de nos jours, la seule grande poésie révolutionnaire ».44 Le Davidson du Père sauvage exprime parfaitement cette idée d’une poésie qui ne peut être sociale et politique qu’à raison d’être subjective. Pasolini, qui souligne la « force révolutionnaire » du monde identifié par le « concept Afrique », met néanmoins au centre de son texte plutôt l’idée de « résistance », en lien avec une préoccupation centrale chez lui, celle d’un nouvel élan que l’Afrique pourrait donner aux espoirs Beginning of page[p. 150] issus de la Résistance, désormais avortés en Europe.45 Comme on l’a vu, c’était déjà ce que l’on pouvait lire en filigrane.

De la négritude à la différence

Le concept de négritude, peu cité par Pasolini, est reformulé dans le texte « La Résistance nègre » en « concept Afrique », cartographie des luttes pour la justice sociale, dont les noirs seraient l’avant-poste. L’intégration de la négritude dans un cadre marxiste se trouve évidemment chez Sartre, où le Nègre « affirme sa solidarité avec les opprimés de toute couleur », ce par quoi « la notion subjective, existentielle, ethnique, de négritude “passe”, comme dit Hegel, dans celle — objective, positive, exacte — de prolétariat ».46 Pasolini, lui, pense très clairement l’émergence de l’Afrique sur la scène géopolitique mondiale à l’intérieur de la dichotomie Préhistoire (sous-prolétariat)-Histoire : à l’avant-poste de la lutte pour la justice sociale, sont les sous-prolétaires africains et américains, « en vérité préhistoriques par rapport à la société industrielle ».47

Néanmoins, si la proximité entre Sartre et Pasolini tient également à une vision hégelienne de l’Histoire, qui leur fait envisager l’émergence africaine sur la scène mondiale dans un cadre dialectique reposant sur l’opposition entre le « Blanc » — pensé comme lieu de la bourgeoisie occidentale, du rationalisme, de la civilisation industrielle, du capitalisme, de la prose — et le « Noir », couleur des opprimés, de la vie, de la poésie, ils ne pensent pas tout à fait cette question de la même manière. Sartre formule ainsi très nettement ce rapport dialectique :

En fait, la Négritude apparaît comme le temps faible d’une progression dialectique : l’affirmation théorique et pratique de la suprématie du blanc est la thèse ; la position de la Négritude comme valeur antithétique est le moment de la négativité. Mais ce moment négatif n’a pas de suffisance par lui-même et les noirs qui en usent le savent fort bien ; ils savent qu’il vise à préparer la synthèse ou la réalisation Beginning of page[p. 151] de l’humain dans une société sans races. Ainsi la Négritude est pour se détruire.48

Cette dernière phrase n’a rien de pasolinien. La destruction ne joue jamais, chez Pasolini, un rôle positif — même en tant que moment de négativité dialectique. Dans le poème « La Guinée », il écrit plutôt ce vers déjà cité : « La Négritude, dis-je, qui sera raison », et il note aussi ceci, à peu près au même moment : « Rien ne meurt jamais dans une vie. Tout survit. Nous sommes à la fois des vivants et des survivants. De même, toute culture est toujours un tissu de survivances. »49 Il écrivait déjà, alors qu’il traduisait l’Orestie : « Certains éléments du monde antique […] resteront acquis, seront réassimilés, et naturellement modifiés. »50 Cette phrase commente l’interprétation qu’il fait de la transformation des Érinyes en Euménides dans le mythe narré par Eschyle : les déesses primitives et irrationnelles sont intégrées, sous la forme nouvelle des Euménides, dans la cité démocratique instaurée par la blanche Athéna.

Pasolini serait-il ici plus proche de Senghor, qui écrit que les « apports européens […] seront intégrés dans, fécondés par les valeurs de la Négritude », ce par quoi la négritude peut « apporter [sa] contribution à la civilisation de l’universel » ?51 J’ai déjà relevé que l’enseignant du Père sauvage lit à ses étudiants l’œuvre du poète sénégalais. Senghor est aussi explicitement cité à la fin du Carnet de notes pour une Orestie africaine, comme « symbole » de l’idéologie africaine de la fin des années cinquante et du début des années soixante : « L’idée que l’Afrique nouvelle, celle du futur, ne peut être qu’une synthèse de l’Afrique moderne, indépendante et libre, et de l’Afrique ancienne ».52 Immédiatement après avoir prononcé cette phrase en voix off, Pasolini filme une danse de la tribu des Wagogo, dont il fait la métaphore de la transformation des Érinyes en Euménides. Comme il l’explique dans le Beginning of page[p. 152] texte « L’Athéna blanche », cette danse symbolise la « transformation de l’irrationalité sauvage et terrifiante en irrationalité qui intègre la rationalité, en tant que complément essentiel. En d’autres termes, la survivance féconde, de l’ethnos africain et de son mythe, au sein d’un nouveau type de société ».53 « L’irrationalité qui intègre la rationalité » est une autre manière de dire que « la Négritude sera raison ».

Une différence subtile mais fondamentale se glisse néanmoins dans les termes, Pasolini employant celui de « survivance » plutôt que de « synthèse ». Picconi a montré le passage, chez Pasolini, d’une pensée de l’histoire influencée très tôt par sa lecture de Nietzsche (les Considérations intempestives) — « délimitant pour le peuple un espace situé à la fois en dehors et à l’intérieur des chronologies dont l’histoire se nourrit : comme si la temporalité circulaire du peuple [l’éternel retour] se greffait sur le telos linéaire de l’histoire » — à une pensée des survivances, nourrie par le travail d’Ernesto de Martino et de Giuseppe Cocchiara, que le poète consulte pour le Canzoniere italiano (1955). Il s’agit d’une pensée « géologique » de l’histoire, vue comme « stratification d’éléments non-contemporains », où des strates et résidus anciens survivent dans le présent, et sont autant menacés de disparition que susceptibles de renaissance.54 Ce qui se joue dans l’Afrique de la fin des années cinquante et du début des années soixante, c’est la possibilité d’une « irrationalité qui intègre la rationalité, en tant que complément essentiel » (je souligne). La survivance est une forme d’intégration qui ne détruit aucun des deux termes. Elle doit être entendue, telle que la mobilise Pasolini, à la lumière de la sineciosi, cette figure de style dans laquelle la contradiction entre deux termes est constitutive de la fécondité de leur alliance. En ce sens, la sineciosi est la figure de l’« alternative » africaine, l’Afrique comme lieu où les deux voies — l’irrationnel et le rationnel, l’antique et le moderne — cœxistent dans une relation à la fois contradictoire et féconde, féconde parce que contradictoire. Beginning of page[p. 151]

Un film daté — Carnet de notes pour une Orestie africaine

En 1969, Pasolini adapte donc l’Orestie d’Eschyle, traduite dix ans plus tôt, en faisant de la transformation des Érinyes en Euménides la métaphore centrale du film : les déesses archaïques et sanguinaires sont intégrées par la blanche et rationnelle Athéna à la cité démocratique. En un sens, le premier plan du film traduit visuellement le poème « À la France » de 1958, dans lequel Pasolini se reflétait en Sékou Touré, « né dans la forêt, de pure mère », remontait « des gouffres de pur esprit sauvage » vers « la grisaille de l’histoire ». Le plan de l’Orestie semble ainsi mettre en image le poème, avec la vitrine intégrant le reflet des arbres africains (arbres qui seront ensuite présentés comme une métaphore des Érinyes) et, en transparence, les objets du magasin associés, par la voix de commentaire de Pasolini, à la modernité. Comme dans le poème, Pasolini se voit dans ce miroir africain (voir figures 2 et 3). La vitre, par ce qu’elle reflète (les arbres : l’archaïque), et ce qu’elle laisse entrevoir (les objets modernes), opère ici comme un lieu contredit, une sineciosi, reflétant elle-même le corps contredit du cinéaste.

FIG. 2. Image palimpseste à l’ouverture du Carnet de notes pour une Orestie africaine (Pier Paolo Pasolini, 1969-1970) : la vitrine d’un magasin reflète les arbres et le corps de Pasolini, et laisse voir en transparence les objets en vente dans le magasin.
Fig. 2. Image palimpseste à l’ouverture du Carnet de notes pour une Orestie africaine (Pier Paolo Pasolini, 1969-1970) : la vitrine d’un magasin reflète les arbres et le corps de Pasolini, et laisse voir en transparence les objets en vente dans le magasin.
FIG. 3. Le corps de Pasolini reflété dans la vitrine du magasin africain au début du Carnet de
              notes pour une Orestie africaine (Pier Paolo Pasolini, 1969-1970).
Fig. 3. Le corps de Pasolini reflété dans la vitrine du magasin africain au début du Carnet de notes pour une Orestie africaine (Pier Paolo Pasolini, 1969-1970).

Pourtant, les années soixante ont changé la donne et l’Orestie africaine de 1969 est explicitement présentée par Pasolini comme un film anachronique. Il le dit en voix off, précisément au moment où il évoque Senghor : « Mon film sera très daté, comme on l’a dit, 1960, l’année où la plupart des États africains ont récupéré très rapidement un retard séculaire, millénaire, en gagnant l’indépendance, la démocratie. »55 Au fil des années soixante, le terme de « nègre » chez Pasolini tend de plus en plus à échapper à la question strictement historique de l’indépendance et à celle, marxiste, de la lutte des classes, pour s’inscrire plus radicalement dans une pensée, sociale et existentielle, de la différence. La Rage, en 1963, n’évoque nullement la négritude. C’est plutôt le poème de la « couleur », comme on l’entend dans la longue séquence consacrée aux luttes pour l’indépendance :

Un nouveau problème éclate dans le monde.
Il s’appelle Couleur.
Il s’appelle Couleur, le nouvel élargissement du monde.56

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[p. 154]

Reprenant le poème clandestin écrit par Éluard en 1942, « Liberté, j’écris ton nom », Pasolini inscrit à nouveau cette séquence historique dans les pas de la Résistance, pour souligner la trahison de ces idéaux par la France du général de Gaulle : « Ah France, la haine ! Ah France, la peste ! Ah France, la lâcheté ! ». C’est ce qu’il avait fait au début de « La Résistance nègre », déplorant la fin de la Résistance, « chez nous, avec les cléricaux et De Gaulle au pouvoir ».57 Mais le problème de la « couleur », et avec lui, du « nègre », relève désormais d’une confrontation entre la normalité (la majorité) et la différence (la minorité), comme l’indique le Traitement du film : Beginning of page[p. 155]

[Le racisme] est la haine pour tout ce qui est différent, pour tout ce qui ne rentre pas dans la norme, et perturbe ainsi l’ordre bourgeois. Malheur à celui qui est différent ! voilà le cri, la formule, le slogan du monde moderne. Haine envers les noirs, donc, les jaunes, les gens de couleur : haine envers les juifs, haine envers les enfants rebelles, haine envers les poètes.58

Le noir est ici la couleur d’une différence, refusée, haïe, par la société bourgeoise. Or, au fil des années 1960, les choses se transforment subtilement, car Pasolini observe avec horreur la nouvelle stratégie de la société néocapitaliste, qu’il nomme l’« homologation » : la standardisation des modes de vie et de pensée, l’absorption de la différence, l’uniformisation des cultures et leur déréalisation, c’est-à-dire Beginning of page[p. 156] leur perte de substance historique, la disparition de leurs particularités. Ainsi, en 1968, il rapproche à nouveau l’intellectuel et le noir en tant que frères dans la diversité et la ségrégation, mais désormais, l’enjeu est dans la lutte « contre le système pour “limiter” […] sa capacité “à les cataloguer et à les intégrer” ».59

Peu à peu, Pasolini substitue donc à l’alternative le terme d’altérité. C’est ce qui ressort d’un texte de 1975, écrit pour le Congrès du Parti radical, où il réfléchit à la lutte pour les droits civiques, et affirme la nécessité d’opposer à la culture du capitalisme une altérité :

Alors que les extrémistes luttent pour les droits civiques marxisés pragmatiquement, au nom, comme je viens de le dire, d’une identification finale d’exploité à exploiteur, les communistes, au contraire, luttent pour les droits civiques au nom d’une altérité. Une altérité (non pas une simple alternative) qui, de par sa nature même, exclut toute possible assimilation des exploités aux exploiteurs.60

La normalisation moyenne-bourgeoise, agissant sous le masque de la « tolérance », touche les questions de classe, de « race », les données sexuelles et religieuses — « fausse tolérance », « faux laïcisme », « fausse réalisation des droits civiques », écrit-il dans ce texte. C’est cela, la « disparition des lucioles » : la neutralisation de la contradiction féconde des survivances. On comprend dès lors qu’il puisse, au début des années soixante-dix, se positionner contre Hegel :

Moi, je suis contre Hegel (existentiellement-empirisme hérétique). Thèse ? Antithèse ? Synthèse ? Cela me semble trop commode. Ma dialectique n’est plus ternaire mais binaire. Il n’y a que des oppositions, inconciliables.61

Il écrivait déjà dans le poème « Callas », lors du tournage de Médée, contemporain de l’Orestie africaine : « Les dépassements, les Beginning of page[p. 157] synthèses !Illusions, | Dis-je, d’Européen vulgaire, mais sans le moindre cynisme. »62

La métaphore de la transformation des Érinyes en Euménides n’a jamais été conçue par Pasolini comme un blanchiment des noires Érinyes, au sens où l’on blanchit l’argent des réseaux parallèles pour le remettre, le fondre dans le circuit de la normalité financière. Un an avant ce Congrès du Parti radical, il citait le Livre blanc de Cocteau, avec son protagoniste homosexuel qui s’est suicidé, « parce qu’il avait compris qu’il est intolérable, pour un homme, d’être toléré ».63 Ainsi, si l’alternative africaine de 1960 — « Afrique, mon unique alternative » — laissait encore espérer une solution possible entre irrationalité et rationalité, une intégration féconde, laissant œuvrer les survivances, n’éradiquant pas les particularités culturelles et existentielles, elle est remplacée, au cours des années soixante et soixante-dix, par la nécessité de maintenir l’altérité : une différence non intégrable, anticorps nécessaire à la survie du corps social, à la vie de l’humanité.

Alors, pourquoi l’Orestie, en 1969 ?

L’Orestie est un film dont la temporalité est complexe. Elle est en quelque sorte la fusion de deux textes du tournant cinquante-soixante, soit le moment où l’Afrique entre véritablement dans l’œuvre pasolinienne — la traduction de la trilogie d’Eschyle et le scénario du Père sauvage — dans un film tourné dix ans plus tard, à l’issue d’une décennie qui est celle, pour Pasolini, de l’avènement du « Nouveau fascisme ». Or, la forme des appunti permet précisément à Pasolini de conserver cette stratification temporelle et d’en jouer. L’ouverture annonce :

Je suis évidemment venu pour tourner, mais pour tourner quoi ? Pas un documentaire, pas un film, je suis venu tourner des notes pour un film : ce film serait l’Orestie d’Eschyle, à tourner dans l’Afrique d’aujourd’hui, dans l’Afrique moderne.64

Beginning of page

[p. 160]

Pasolini saisit Eschyle pour éprouver le mythe dans la réalité de l’Afrique contemporaine, et les « appunti », les notes, sont la forme filmique de cette démarche. Dans une séquence du film, il demande à des étudiants africains de Rome s’il leur semble plus pertinent de tourner la tragédie d’Oreste dans l’Afrique des années 1970, ou s’il ne devrait pas plutôt « rétrodater » le film en 1960. Un étudiant lui répond que l’Afrique contemporaine est en effet déjà trop moderne pour accueillir le mythe, qu’« elle est en train de ressembler à l’Europe, qu’elle perd son caractère typiquement africain ».65 Plus loin, dans une autre séquence avec ces étudiants de Rome, Pasolini demande comment pourrait être représentée cette « espèce de synthèse » qu’est la transformation des Furies en Euménides.66 Un autre étudiant lui répond alors que cette transformation ne peut sans doute pas opérer complètement, que les Furies et les Euménides cœxisteront, poursuivant ainsi :

L’Africain possède une vie intérieure très profonde, un esprit profond. Ainsi quand vous parlez des Furies qui se transforment en Euménides, sans doute naîtront des Euménides sans que les Furies disparaissent. Qu’elles puissent disparaître totalement me semble très difficile.67

On pourrait dire que le premier étudiant fait le constat de l’homologation, et que le second exprime la possibilité d’une altérité radicale, désormais non intégrable. Ensemble, ils formeraient le Pasolini des années soixante-dix.

Cela n’empêche pas Pasolini de filmer, tout de suite après cette seconde séquence avec les étudiants de Rome, une danse ancestrale de la tribu des Wagogo en Tanzanie, puis une cérémonie nuptiale au Tanganyika, énoncées toutes deux comme de possibles métaphores de la transformation des Érinyes en Euménides, toutes deux manifestations de la survivance d’un « monde magique qui se présente comme tradition, comme un esprit antique autochtone, qui refuse de disparaître ».68 Il récite peu après ces mots de la déesse Athéna : Beginning of page[p. 159]

J’obéis à l’amour que je porte à cette
ville, en vous accueillant ici, vous, en tant que maîtresses,
grandes puissances, vigilantes et mystérieuses.
Vous régirez chaque rapport entre les hommes.
Qui ne comprend pas qu’il est juste d’accepter
chez nous ces divinités primordiales
ne comprend pas les contradictions [constrasti] de la vie :
c’est à la barbarie des pères qu’il est confronté :
et l’impiété inconsciente,
malgré les cris de sa conscience,
peut le conduire à un sombre destin.

Que cette conclusion soit « datée », selon les mots mêmes de Pasolini, ne signifie pas qu’elle soit totalement dépassée. Avant de revenir sur ce point, regardons les toutes « dernières notes pour conclure », que Pasolini propose à la fin du film. Il s’agit de paysans africains en train de bêcher (voir figure 4), et Pasolini commente en voix off :

Mais comment conclure ? La conclusion définitive n’existe pas. Elle est suspendue. Une nouvelle nation est née, ses problèmes sont infinis, mais les problèmes ne se résolvent pas, ils se vivent. Et la vie est lente. Le cheminement vers le futur n’a pas de solution de continuité. Le travail d’un peuple ne connaît ni rhétorique ni délai. Son futur est dans son inquiétude pour le futur, et son inquiétude est une grande patience.69

FIG. 4. Paysans africains en train de bêcher dans le finale du Carnet de notes pour une Orestie africaine (Pier Paolo Pasolini, 1969–1970).
Fig. 4. Paysans africains en train de bêcher dans le finale du Carnet de notes pour une Orestie africaine (Pier Paolo Pasolini, 1969–1970).

Or, je suis frappée de la similitude entre un passage de « L’Orphée noir » et la fin de cette Orestie noire. En effet, Sartre élabore à partir d’un vers de Césaire qui écrit : « Ma négritude […] troue l’accablement opaque de sa droite patience. » Sartre écrit alors que la négritude n’est pas passivité, mais patience, ce par quoi Césaire met en œuvre une poésie d’agriculteurs (contre une prose d’ingénieurs) : « Le noir est d’abord un paysan, la technique agricole est “droite patience” ; elle fait confiance à la vie ; elle attend. »70 Quelques pages plus loin, il reprend : « L’apport noir dans l’évolution de l’Humanité, ce n’est plus une saveur, un goût, un rythme, une authenticité, un bouquet Beginning of page[p. 160] d’instincts primitifs : c’est une entreprise datée, une patiente construction, un futur. »71

Pasolini a certainement été sensible, sans doute via ce texte de Sartre, à l’invention de Césaire, la « droite patience ». Pourtant, en 1969, un entretien avec Ferdinando Camon, dans lequel Pasolini revient sur le vers « Afrique, mon unique alternative », semble renvoyer le finale de l’Orestie à une conception ancienne, peut-être dépassée. Aujourd’hui, dit-il, Beginning of page[p. 161]

Les paysans de couleur attendent un nouveau futur qui les transformera, de paysans préhistoriques en paysans historiques, d’abord, puis de paysans historiques en petits bourgeois. C’est là la grise, décevante, lente réalité.72

Cette phrase résonne avec la conclusion de l’Orestie, dont elle reprend et inverse certains termes — désormais, les paysans du Tiers-monde suivent la voie de l’homologation — comme si cette dernière était, elle aussi, datée, désormais dépassée par la décevante et grise réalité.

Résumons : l’Orestie est présentée par Pasolini comme un film « daté » et la métaphore des Euménides est en effet contestée par les étudiants, qui observent la modernisation de l’Afrique d’une part (donc le risque de la disparition pure et simple des traditions autochtones), le maintien des Furies d’autre part (donc leur non-intégrabilité, comme Euménides, dans la société moderne). Pourtant, Pasolini trouve, en Afrique, une réalité à filmer, la danse des Wagogo, comme métaphore de la transformation des Érinyes des Euménides. Le commentaire final est, lui aussi, contredit par l’entretien exactement contemporain de Pasolini avec Ferdinando Camon où Pasolini entrevoit déjà le devenir petit-bourgeois des « paysans de couleur », mais Pasolini filme bien les paysans africains comme métaphore de la patience de la vie, qui est inquiétude et confiance, souffrance et résistance, suspension du sens devant la temporalité ouverte de la vie.

Alors, pourquoi l’Orestie en 1969 ? Voici deux propositions, non exclusives l’un de l’autre, et même étroitement liées :

Hypothèse 1 : en 1969, Pasolini réalise aussi Médée, qui se termine sur les mots furieux d’une Médée-Érinye — « Rien n’est plus possible désormais ». Les deux finales semblent se contredire, et les films sont en fait à lire ensemble, comme un palimpseste, Pasolini exposant avec l’Orestie, sous Médée, une strate antérieure de son rapport à l’Afrique. C’était le principe de La Divine Mimésis, ainsi présenté dans cette note du 1er novembre 1964 :Beginning of page[p. 162]

Le livre doit être écrit par couches, toute nouvelle rédaction doit être sous forme de note, datée, de façon que le livre se présente presque comme un journal. Par exemple, tout le matériel déjà écrit doit être daté (il y a environ un an, un an et demi) : il ne doit pas être éliminé de la nouvelle rédaction, qui doit consister en une nouvelle couche additionnelle, ou en une longue note. Et de même pour les rédactions successives. À la fin, le livre doit se présenter comme une stratification chronologique, un vivant processus formel : où une nouvelle idée n’effacerait pas la précédente, mais la corrigerait, ou plutôt la laisserait absolument inaltérée, la conservant formellement comme un document du passage de la pensée. Et comme le livre sera un mélange de choses faites et de choses à faire — de pages achevées et de pages ébauchées, ou seulement projetées — sa topographie temporelle sera complète : il aura à la fois la forme magmatique et la forme progressive de la réalité (qui n’efface rien, qui fait cœxister le passé avec le présent), etc.73

Hypothèse 2 : cette première hypothèse n’est pas satisfaisante à elle seule en tout cas, car Pasolini filme bien, dans la réalité africaine de 1969, des survivances : le casting pour les personnages, les repérages des lieux, le rituel funéraire, les propositions de métaphores pour la transformation des Érinyes en Euménides satisfont Pasolini, qui écrit, cette même année, à propos de Médée : « Par sa nature, le cinéma ne peut pas représenter le passé. Le cinéma représente la réalité à travers la réalité. »74 Dans l’entretien cité avec Ferdinando Camon, Pasolini corrige par ailleurs le pessimisme premier sur les paysans homologués, par cette phrase, un peu plus loin : « Mais il reste le fait que le sous-prolétaire et le paysan sont subversifs, simplement parce qu’ils “sont.” »75 Les survivances existent. L’homologation n’est pas encore totalement accomplie. Ce qui est daté, c’est l’idée de l’alternative, d’une sineciosi œuvrant comme contradiction féconde. Ce qui peut encore être mobilisé contre le système néocapitaliste, c’est l’altérité, soit des survivances pas tout à fait Euménides, mais encore Érinyes.

Au fond, on ne peut entendre, on ne peut même accepter l’Orestie dans l’œuvre pasolinienne que si on la lit avec Médée. Il y a urgence, Beginning of page[p. 163] l’avenir peut être inquiétant, mais le cinéma, langue écrite de la réalité, est encore là pour mettre au jour et imposer, sous l’irréalité contemporaine, ce que Pasolini appelle dans Pétrole les « réapparitions de la Réalité » — sans quoi c’est toute la trilogie antique qui perd son sens. Ces réapparitions, sans doute faut-il les traquer, les provoquer, peut-être même faudra-t-il, in fine, les faire advenir dans un texte littéraire mettant en scène des « Visions ». Pasolini l’expérimentera dans Pétrole, avec sa longue « Vision du Merde » et son dispositif amphibie, littéraire et cinématographique, dans lequel Carlo voit apparaître, sous l’irréalité atroce des corps homologués des années soixante-dix, les corps réels d’autrefois. Cette scène, il l’observe « comme un metteur en scène sur un chariot de travelling »,76 tiré par trois dieux. D’une autre Vision du roman, celle du « Jardin médiéval », le narrateur écrit ceci, qui vaut tout compte fait pour la Vision du Merde :

En tant qu’auteur et inventeur de cette Vision, je dois dire que L’Anachronisme peut retrouver réalité et actualité, mais que cela ne se produit pas au hasard. C’est la nécessité de maintenir du Passé dans le temps moderne (arrogant) qui le rend éloquent. Il est vrai qu’il s’agit d’un retour et d’une réinstallation éphémère, mais au moment où c’est, c’est.77

Notes

  1. « Alla Francia », paru dans Officina (mars–avril 1959), repris dans La Religione del mio tempo en 1961. En français dans Pier Paolo Pasolini, La Religion de mon temps, éd. et trad. René de Ceccatty (Paris : Rivages poche, 2020), p. 235.
  2. Congrès organisé par la revue Présence africaine, créée par Alioune Diop, sur laquelle je reviendrai dans la suite de ce texte. À Rome furent présents nombre d’hommes politiques et intellectuels, dont Sékou Touré, Césaire, Senghor, Fanon, ou Glissant. La conférence de Fanon, qu’il reprendra ensuite dans Les Damnés de la terre, fut traduite dans Rinascita dès avril 1959 sous le titre « Nazione, cultura e lotta di liberazione ».
  3. « Un fulminante esempio di poesia e verità ! Esatto, vero, storicamente, psicologicamente, poeticamente, politicamente ». Voir Franco Fortini, lettre du 14 décembre 1958, dans Pier Paolo Pasolini, Le lettere, éd. Antonella Giordano et Nico Naldini (Milan : Garzanti, 2021), p. 1144.
  4. L’allocution de Sékou Touré est disponible sur le site de l’Institut National de l’Audiovisuel : <https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/audio/phz09010864/allocution-du-president-sekou-toure-en-reponse-a-la-proposition-de> [consulté le 10 janvier 2025].
  5. Sur le concept de Préhistoire chez Pasolini et son origine plus hégelienne que strictement marxiste, voir Gian Luca Picconi, « Poesia in forma di rosa di Pasolini : saggio di commento » (thèse de doctorat sous la direction de Giorgio Bertone, Université de Gênes, 2010), p. 82 sqq.
  6. Pier Paolo Pasolini, La Religion de mon temps, p. 235.
  7. Pier Paolo Pasolini, « Lettera del traduttore » [1960], dans Pasolini, Teatro, éd. Walter Siti et Silvia De Laude (Milan : Mondadori, 2001), p. 1007–09 (p. 1009). Les traductions des éditions italiennes citées dans cet article sont de mon fait.
  8. Pasolini, La Religion de mon temps, p. 282–89 (p. 289).
  9. Pier Paolo Pasolini, « Testimonianza per i 121 », paru dans Il Contemporaneo (octobre–novembre 1960), repris dans Pasolini, Saggi sulla politica e sulla società, éd. Walter Siti et Silvia De Laude (Milan : Mondadori, 1999), p. 738–39, traduit en français par Hervé Joubert-Laurencin et Caroline Michel dans Pier Paolo Pasolini, Contre la télévision et autres textes sur la politique et la société (Besançon : Les Solitaires Intempestifs, 2003), p. 49–50.
  10. Ibid.
  11. Michel Cournot, « Tonton Marx à Bethléem », Le Nouvel Observateur, 4 mars 1965.
  12. Pasolini publie le soggetto du film entre avril et mai 1965 dans Vie nuove, repris dans I dialoghi, éd. Giovanni Falaschi (Rome : Editori Riuniti, 1992), p. 398–410. En français dans Pier Paolo Pasolini, Dialogues en public, trad. François Dupuigrenet Desroussilles (Paris : Sorbier, 1980), p. 184–93. Le scénario de l’épisode figure dans Pier Paolo Pasolini, Per il cinema, éd. Walter Siti et Franco Zabagli, 2 vol. (Milan : Mondadori, 2001), i, p. 679–712. Enfin, l’épisode filmé est disponible dans plusieurs éditions DVD et Blu-Ray du film.
  13. Pier Paolo Pasolini, « L’Aigle et sa proie » [20 mai 1965], dans Pasolini, I dialoghi, p. 410–13 (p. 413), et Pasolini, Dialogues en public, p. 193–95 (p. 195).
  14. Pier Paolo Pasolini, « Évangile rouge » [22 octobre 1964], dans Pasolini, I dialoghi, p. 328–30 (p. 330) et Pasolini, Dialogues en public, p. 139–41 (p. 141).
  15. Sur cette question, voir Anne-Violaine Houcke, « Saint François selon Pasolini. La prédication des oiseaux : une fable révolutionnaire », Double Jeu, 13 (2016), p. 73–99 <https://doi.org/10.4000/doublejeu.339>.
  16. Pasolini avait traduit en italien, à l’automne 1949–50, ces vers du poème « Fêtes de la faim » paru dans le recueil Les Illuminations. Voir Pier Paolo Pasolini, Tutte le poesie, éd. Walter Siti, 2 vol. (Milan : Mondadori, 2003), ii, p. 1390.
  17. Le jour où il entendit le poète Antonio Rinaldi lire « Le bateau ivre », en 1937 (selon le récit de Pasolini) ou 1938–39 (selon la rectification d’Antonio Rinaldi). Voir Enzo Siciliano, Pasolini, une vie, trad. Jacques Joly et Emmanuelle Genevois (Paris : Éditions de la différence, 1983), p. 68 et Nico Naldini, Pasolini, biographie, trad. René de Ceccatty (Paris : Gallimard, 1991), p. 24. À Jon Halliday, Pasolini dira que son détachement vis-à-vis de la société fasciste fut d’abord ingénu, culturel, lié à ses lectures de Dostoïevski, Shakespeare, Rimbaud, les poètes hermétiques (Pier Paolo Pasolini, Pasolini par Pasolini : entretiens avec Jon Halliday, trad. René de Ceccatty (Paris : Seuil, 2022), p. 31).
  18. Pasolini, Le lettere, p. 1222.
  19. Pier Paolo Pasolini, « Salinari : riposta e replica », Vie nuove, 45 (16 novembre 1961), dans Pasolini, Saggi sulla politica e sulla società, p. 975–80 (p. 978), et Pasolini, Dialogues en public, p. 76–79 (p. 78).
  20. Pier Paolo Pasolini, Interviste corsare sulla politica e sulla vita 1955–1975, éd. Michele Gulinucci (Rome : Liberal Atlantide Editoriale, 1995), p. 49. Pasolini en fait un geste archétypal, répété par toutes les avant-gardes.
  21. Pasolini, Pasolini par Pasolini : entretiens avec Jon Halliday, p. 43.
  22. Mario Richter, dans un commentaire du poème, écrit : « Si viene così a instaurare in questa prima metà dell’epigramma una simbologia di colori : grigiore, negro, biondo ; spurio il primo, puri gli altri due. Il mondo della purezza emerge dunque nel mondo dell’impurità. »  Voir Mario Richter, « La solitudine di Pasolini (lettura dell’epigramma “Alla Francia”) », Paragone, 326 (avril 1977), p. 48–54 (p. 50).
  23. Pier Paolo Pasolini, « Una diversa esperienza vitale » [1965], dans Pasolini, Saggi sulla politica e sulla società, p. 828–29. Sur ce texte, voir Anne-Violaine Houcke, L’Antiquité n’a jamais existé. Fellini et Pasolini archéologues (Rennes : Presses Universitaires, 2023), p. 146–48.
  24. Le texte figure en effet dans les archives de Pasolini relatives au Père sauvage (Pasolini, Per il cinema, ii, p. 3053–54).
  25. Pier Paolo Pasolini, Le Père sauvage, trad. José Guidi (Paris : Les Formes du Secret, 1980), p. 96.
  26. Furia nera, production La Settimana Incom, 24/11/1961, I215001, disponible sur le site de l’Archivio Luce <https://patrimonio.archivioluce.com/luce-web/detail/IL5000036809/2/-13737> [consulté le 10 janvier 2025]. Le film est mentionné par Silvia Riva dans « Trames de mémoires documentaires et filmiques autour du Congo RC : du Père sauvage (1967) à La Rage de Pasolini (2008) », dans Des Italiens au Congo aux Italiens du Congo, éd. Daniele Comberiati et al. (Paris : L’Harmattan, 2020), p. 305–24 (p. 307). Après la présentation des militaires « trucidés », le journal se termine sur les populations responsables du carnage : des images de danses « tribales », au son de tambours et de cris, accompagnent ces mots colonialistes du présentateur : « Espérons que, dans un futur proche, la civilisation pourra racheter ces populations ».
  27. Pasolini, « Lettera del traduttore », p. 1009.
  28. Pasolini, Le Père sauvage, p. 90.
  29. Pasolini, « Lettera del traduttore », p. 1009.
  30. Pier Paolo Pasolini, Poésie en forme de rose, trad. René de Ceccatty (Paris : Payot & Rivages, 2015), p. 59. Gian Luca Picconi date l’écriture de ce poème entre l’automne 1961 et la fin janvier 1962 (« Poesia in forma di rosa » di Pasolini, p. 126–27).
  31. Pasolini, Le Père sauvage, p. 15.
  32. Le nom de Davidson figure aussi dans le poème « L’uomo di Bandung », dont la première rédaction est datée été 1961–octobre 1962 (Pasolini, Tutte le poesie, i, p. 1305–13), où Pasolini écrit « Davidson ’Ngibuini, è un kikuyu » (p. 1306). Dans la notice du poème, Walter Siti écrit que le Kényan Davidson et l’Indien Revi, l’autre jeune garçon du poème (qui apparaît dans le texte L’Odeur de l’Inde), sont deux garçons rencontrés par Pasolini au cours de son voyage de janvier–février, en Inde puis au Kenya. Rien n’empêche de supposer que le Davidson du Père sauvage doit aussi un peu au poète Davidson Nicol, qui a particulièrement attiré l’attention de Pasolini, et au « David » des poèmes frioulans de jeunesse.
  33. Pier Paolo Pasolini, « La Resistenza negra », dans Pasolini, Saggi sulla letteratura e sull’arte, éd. Walter Siti et Silvia De Laude, 2 vol. (Milan : Mondadori, 1999), ii, p. 2344–55 (p. 2353).
  34. Pier Paolo Pasolini, « Il pianto della scavatrice » [daté de 1956, publié dans Le Ceneri di Gramsci en 1957], dans Pasolini, Tutte le poesie, i, p. 838.
  35. Graziano Benelli, La negritudine in Italia : A. Césaire, L.-G. Damas, L. S. Senghor : 1950–94 (Rome : Bulzoni, 1995), p. 9.
  36. Sur les traductions de Sereni, voir ibid., p. 12–14 ; Carlo Bo, Antologia di poeti negri (Florence : Parenti, 1954) ; Alfredo Riedel, Poesia negra di espressione francese, avec une préface de Léopold Sédar Senghor (Lanciano : Edizioni di Nuvole, 1957).
  37. Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française, éd. Léopold Sédar Senghor (Paris : Presses Universitaires de France, 2016), p. 70.
  38. Jean-Paul Sartre, « Orphée noir », préface à Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française, éd. Léopold Sédar Senghor (Paris : Presses Universitaires de France, 1948), p. ix–xliv (p. xlii).
  39. Franco Fortini, Il Movimento Surrealista (Milan : Garzanti, 1959), p. 186–89.
  40. Benelli indique que deux passages de Et les chiens se taisaient sont traduits dans l’anthologie plutôt confidentielle mais préfacée par Senghor dirigée par Alfredo Riedel en 1957 sous le titre Poesia negra di espressione francese (Lanciano : Edizioni di Nuvole). Aimé Césaire, central dans l’anthologie de Carlo Bo, est sans doute le poète le plus présent dans la réception italienne de cette poésie « noire » francophone, comme en atteste entre autres l’entrée « Césaire » dans le Dizionario Universale della Letteratura Contemporanea édité par Mondadori en 1959. Il est par ailleurs présenté comme un « poète de réputation mondiale » par Cristina Brambilla dans son compte-rendu du Congrès de 1959 (« Temi del 2° Congresso Mondiale degli scrittori e artisti neri », Africa, 3 (mai–juin 1959), p. 122–24 <https://www.jstor.org/stable/40757061> [consulté le 10 janvier 2025]. Cette même année, il est aussi intégré à la littérature surréaliste par Fortini (voir note précédente) et Benjamin Péret, La poesia surrealista francese (Milan : Schwarz, 1959).
  41. Picconi, « Poesia in forma di rosa » di Pasolini, p. 134.
  42. C’est même lui qui aurait trouvé le titre de la revue (Ferroudja Allouache, « Naissance et résistance d’une revue : Présence africaine », Continents manuscrits, 9 (2017) <https://doi.org/10.4000/coma.950>. Lancée en 1947, elle accueille en 1948 le texte de Sartre, « Orphée noir ».
  43. Sartre, « Orphée noir », p. xviii.
  44. Ibid., p. xii. Au titre des affinités nombreuses, dont certaines seront précisées dans la suite du présent texte, j’ajouterai que tous deux relèvent une parenté entre la poésie surréaliste et la poésie noire.
  45. Dans l’introduction de son anthologie, Carlo Bo parlait de cette littérature comme une « culture […] résistante » (Bo, Antologia di poeti negri, p. ix).
  46. Sartre, « Orphée noir », p. xl.
  47. Pasolini, « La Resistenza negra », p. 2354.
  48. Sartre, « Orphée noir », p. xli.
  49. Pier Paolo Pasolini, « Marxismo e religiosità » [30 novembre 1961], dans Pasolini, I dialoghi, p. 203–07 (p. 206) ; en français : « Marxisme et religiosité », dans Dialogues en public, p. 79–82 (p. 82).
  50. Pasolini, « Lettera del traduttore », p. 1009.
  51. Léopold Sédar Senghor, « Négritude et civilisation gréco-latine ou Démocratie et socialisme », conférence du 20 novembre 1965, Bulletin de l’Association Guillaume Budé, 1 (1966), p. 100–18 (p. 118). Je souligne.
  52. Pasolini, Per il cinema, i, p. 1194.
  53. Pier Paolo Pasolini, « L’Athéna blanche », dans Pasolini, Per il cinema, i, p. 1202–04 (1203). Le passage est aussi cité par Picconi, « La “sopravvivenza” di Pasolini », p. 77.
  54. Gian Luca Picconi, « La “sopravvivenza” di Pasolini : modernità delle tradizioni popolari », dans Le tradizioni popolari nelle opere di Pier Paolo Pasolini e Dario Fo, éd. Lisa El Ghaoui et Federica Tummillo (Pise : Fabrizio Serra, 2014), p. 69–78 (p. 72). Voir aussi Houcke, L’Antiquité n’a jamais existé, p. 127–53.
  55. Pasolini, Per il cinema, ii, p. 1194.
  56. Pier Paolo Pasolini, La Rage, trad. Patrizia Atzei et Benoît Casas (Caen : Nous, 2014), p. 53.
  57. Pasolini, Per il cinema, ii, p. 2344.
  58. Pasolini, La Rage, p. 17.
  59. Pier Paolo Pasolini, « Gli studenti di Ombre rosse », dans Pasolini, Saggi sulla politica e sulla società, p. 1157–58.
  60. Pier Paolo Pasolini, « Intervention au congrès du Parti radical » (texte préparé pour le congrès du 4 novembre 1975, deux jours après la mort de Pasolini, publié posthume dans le journal il Mondo du 13 décembre 1975 sous le titre « Son testament »), dans Pasolini, Lettres luthériennes, trad. Anna Rocchi Pullberg (Paris : Seuil, 2000), p. 221–33 (p. 227).
  61. Entretien avec Sergio Arecco paru dans Filmcritica en mars 1971, repris dans Sergio Arecco, Pier Paolo Pasolini (Rome : Partisan, 1972), p. 75.
  62. Pier Paolo Pasolini, « Callas », dans Pasolini, Entretiens avec Jean Duflot (Paris : Éditions Gutenberg, 2007), p. 232.
  63. Pier Paolo Pasolini, « M. Daniel-A. Baudry : Gli omosessuali » [26 avril 1974], repris dans Pasolini, Saggi sulla politica e sulla società, p. 487–94 (p. 494).
  64. Pasolini, Per il cinema, i, p. 1177.
  65. Ibid., p. 1181.
  66. Ibid., p. 1193. Pasolini emploie aussi bien le terme grec (Érinyes) que le terme latin (Furies). En certains endroits, il utilise le terme « Ménades » (par exemple dans « L’Athéna blanche »), mais il s’agit alors d’une confusion avec les déesses du thiase dionysiaque, qui déchiquetèrent le corps d’Orphée.
  67. Ibid., p. 1194.
  68. Ibid., p. 1195.
  69. Pasolini, Per il cinema, ii, p. 1196. L’idée de la suspension vient de la lecture d’un entretien avec Roland Barthes, paru dans les Cahiers du cinéma en 1963 et traduit dans Cinema e film en 1966 : voir Hervé Joubert-Laurencin, « Pasolini-Barthes : engagement et suspension de sens », Studi pasoliniani, 1 (2007), p. 55–67.
  70. Sartre, « Orphée noir », p. xxx–xxxi.
  71. Ibid., p. xxxix–xli.
  72. Pier Paolo Pasolini, « [Intervista rilasciata a Ferdinando Camon] », dans Pasolini, Saggi sulla politica e sulla società, p. 1626–46 (p. 1645).
  73. Pier Paolo Pasolini, La Divine Mimésis, trad. Danièle Sallenave (Paris : Bartillat, 2023), p. 83–84.
  74. Pier Paolo Pasolini, « Le sentiment de l’histoire » [1970], dans Pasolini Saggi sulla letteratura e sull’arte, ii, p. 2819, traduit en français par Hervé Joubert-Laurencin, Trafic, 17 (printemps 2010), p. 131–32.
  75. Pasolini, « [Intervista rilasciata a Ferdinando Camon] », p. 1645.
  76. Pier Paolo Pasolini, Pétrole, trad. René de Ceccatty (Paris : Gallimard, 2006), p. 344.
  77. Ibid., p. 268.

Références

Bibliographie

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Filmographie

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  2. Pasolini, Pier Paolo, Accattone (1961)
  3. Appunti per un’Orestiade africana (Carnet de notes pour une Orestie africaine) (1970)
  4. Medea (Médée) (1969)
  5. La Ricotta (1963)
  6. Uccellacci e uccellini (Des oiseaux, petits et gros) (1966)
  7. Il vangelo secondo Matteo (L’Évangile selon saint Matthieu) (1964)